Les choses sont allées très vite pour Alioune Kandji. Convoqué vendredi par la Sûreté urbaine (Su), il s’est vu notifier un mandat d’arrêt émis par le juge du premier cabinet du tribunal de Kaolack. Le même jour, il a été conduit à la prison de cette localité où il est incarcéré dans l’attente de son audition par le magistrat ins-tructeur. Poursuivi dans un premier temps pour association de malfaiteurs, escroquerie, faux et usage de faux, il est désormais visé aussi pour outrage à magistrat, outrage à un commandant de la force publique dans l’exercice de ses fonctions et diffusion de fausses nouvelles.
Comme le révélait à l’époque Libération, cette affaire commence au courant de l’année 2018 quand le nommé Mamadou Moustapha Sarr, agissant pour le compte d’Alioune Kandji, avait saisi le nommé Mansour Sy, chef d’entreprise, pour lui proposer la vente de terrains à usage commercial, situés sur le lotissement du chemin de fer à Kaolack.
Dans la parution de ce lundi, Libération informe qu’à la suite d’une visite du site, il avait contacté Kandji qui avait confirmé avoir mandaté Sarr afin de vendre les terrains pour son compte au prix de 28.000.000 francs CFA. Après avoir accepté le prix, Kandji lui avait demandé de verser un acompte de 2.000.000 Fcfa pour matérialiser le projet de vente. Le montant avait été remis directement à son mandataire.
Le 16 septembre 2018, il avait remis à Kandji le reliquat de 26.000.000 par chèque Ecobank et Kandiji lui avait fait une décharge manuscrite pour attester du versement intégral de la somme due. Par la suite, les nommés Moustapha Guèye, agent au bloc fiscal de Kaolack et Mamadou Sarr, lui avaient vendu d’autres parcelles sur le même site.
« Conventions de location »
Après avoir reçu l’argent, Kandji lui avait remis des conventions de location qu’il avait lui-même signées et non des actes de cession. Lorsqu’il avait attiré leur attention sur cette situation, ils l’avaient rassuré en lui disant qu’il obtiendrait son autorisation de construire en bonne forme et qu’il ne devrait pas se faire des soucis pour cela. Quand M. Sy a déposé la demande d’autorisation de construire, le service régional de l’Urbanisme de Kaolack avait rejeté la demande au motif qu’il ne pouvait pas faire des constructions sur ce site qui relèverait du domaine public et qui n’est pas déclassé pour y permettre des cessions.
À la suite d’une plainte de M.Sy, une enquête avait été ouverte et toutes les parties entendues. Kandji, dans son argumentaire, avait déclaré qu’étant responsable de sécurité des chemins de fer, il aurait été payé en nature, en contrepartie des prestations qu’il aurait faites. C’est ce qui l’aurait autorisé à céder les parcelles de terrains à usage commercial à Mansour Sy au montant de 28.000.000 Fcfa.
Cependant, rapporte Liberation, il avait montré le contrat de prestation qui le liait à la Sncs, mais n’a jamais montré un acte juridique provenant de cette dernière qui montre que c’est elle qui lui a remis les lots en contrepartie de sa prestation. Au surplus, la liquidation de la Sncs ne portait pas sur le patrimoine foncier qui relève toujours du domaine public et qui n’a jamais été déclassé pour permettre une quelconque aliénation de la part d’un particulier.
À la question de savoir la destination des 28.000.000 Fcfa encaissés, Kandji avait prétendu avoir remis une partie au responsable de la Dscos et une autre partie au responsable de l’Urbanisme d’alors, mais il n’a jamais fourni des preuves de ces remises. Qui plus est, à quel titre il devait leur remettre leur quote-part si ces terrains lui appartenaient, d’autant plus que es personnes dont il s’agit avaient quitté leur poste depuis longtemps.
Au cours de l’enquête, suite aux réquisitions adressées aux services techniques de l’État, il était établi par le bureau des domaines de Kaolack que le Tf 1267/Kl dans lequel se trouvent les terrains cédés par Kandji faisait l’objet d’un aménagement en « Boulevard du Cœur de ville ». Or, les dépendances du domaine public ne sont pas cessibles eu égard à l’article 9 de la loi 76-66 đư 02/07/1976; le domaine public étant inaliénable et imprescriptible.
Le service régional de l’Urbanisme avait également répondu qu’aucune procédure d’instruction d’une autorisation de construire n’était envisageable sur ce site. À partir de ces réponses, les autres mis en cause, Moustapha Guèye et Mamadou Moustapha Sarr avaient remboursé intégralement au sieur Mansour Sy les 14 millions de Fcfa qu’ils avaient encaissés pour les lots qu’ils lui avaient vendus. Mais Alioune Kandji avait refusé de rembourser au motif qu’il avait agi au nom de l’État et il appartient à l’acquéreur de se débrouiller pour se faire délivrer une autorisation de construire ou se faire rembourser par l’État alors que les sommes qu’il avait encaissées de lui n’ont jamais été versées dans les caisses de l’État.
Pourquoi le dossier s’est corsé
Face à cette situation, Cheikh Dieng, alors Procureur de la République de Kaolack avait instruit le commissaire central de Kaolack de convoquer Kandji et et de lui notifier son obligation de rembourser les sommes perçues illegalement sous peine d’arrestation. Une convocation lui avait été servie le 28/11/2022
pour être entendu le 30/11/2022 sur les instructions du Procureur. Mais Kandji a déclaré qu’il ne déférera pas à la convocation et que « s’il est arrêté c’est l’État du Sénégal qui est arrêté » selon ses propres termes puisqu’il aurait, selon lui, agi au nom de l’État.
C’est en ce moment que le commissaire central de Kaolack avait saisi ses homologues de Dakar pour un concours en vue de localiser et de l’interpeller sur instruction du Procureur.
Lorsque les éléments de la Su se sont rendus à son domicile, Alioune Kandji s’était retranché dans une chambre avec ses enfants et petits enfants mineurs.
Pire, il avait déclaré aux policiers qu’il tenait une arme et qu’il n’hésiterait pas en à user s’ils devaient l’arrêter.
Devant cette situation, les policiers s’étaient répliés. Entre temps, un intermédiaire de l’ancien régime a remis à la partie civile, pour le compte de Kandji, 15 millions de Fcfa sur les 28 en cause. Outre le fait que Kandji reste devoir à ce jour 13 millions de Fcfa, l’outrage et la diffusion de fausses nouvelles se sont greffés au dossier car le mis en cause avait tenté de salir le commissaire de police de Kaolack, les éléments de la Su venus le cueillir et les magistrats en charge du dossier allant même jusqu’à les taxer, l’époque, d’être membres de Pastef.